Encore éloigné du monde moderne tel que nous le connaissons, le peuple karen, entre les montagnes difficilement accessibles de la Birmanie et de la Thaïlande, garde encore son intégrité et un esprit de chasseur-cueilleur. Jean Devaux, volontaire des Missions Étrangères de Paris comme de nombreux avant lui, vécut un an auprès de ce si riche peuple karen : riche de sa simplicité, de sa pauvreté, de son entraide sociale. La publication de carnets de route est le désir de faire le récit d’un émerveillement.

« À l’entrée de la piste, je commence la marche. Trois bonnes heures. Il y a quelque chose d’autre dans les marches que je fais habituellement : je ne marche pas pour la détente. Je marche pour revenir chez moi, sans autre moyen de locomotion que mes jambes. Chose qui est devenue totalement absente de notre société occidentale : le fait de marcher longuement pour rentrer chez soi.
Le temps passe différemment, la fatigue diffère de celle d’une randonnée. Il y a autre chose dans l’atmosphère qui se fait sentir. Un moment d’éternité quand on vient du monde du moteur à explosion. En pénétrant dans la vallée de la Mae Woei Clo, la rumeur du village se fait entendre. À mon arrivée à la première maison, une Karen et deux acolytes, assis sur une souche, me crient Auf siv ? (veux-tu un verre ?) Mei, tiana (oui, super) et je prends le gobelet qu’elle me tend. »