Le roman que je vous propose met en avant la fragilité de l’être humain face à la souffrance qu’il peut endurer et sa réaction pour l’affronter. Il s’agit d’une fiction où se mêlent introspection de l’âme humaine et enquête policière. Il y a de l’action, mais j’ai surtout voulu explorer les sentiments humains, l’éternel dilemme entre la résilience et « le côté obscur de l’âme humaine ».
Plusieurs de mes personnages seront confrontés à ce dilemme. Ce qui m’a intéressé est d’imaginer leur réaction, leur choix, en fonction de leur parcours de vie, leur sensibilité, leur caractère, leur âge. Ballotés par les aléas de leurs vies, mes personnages vous entraîneront dans un tourbillon de sentiments où dominent l’amour, l’innocence, la tendresse, la compassion, la quête du bonheur, mais aussi le désespoir, la haine, la rancoeur, la mélancolie. Chacun a sa complexité. Vous ne pourrez que vous y attacher car vous pourriez les croiser. Ils sont simplement humains.

L’histoire : Vova est un petit garçon qui grandit douloureusement dans l’URSS des années 80, entre une mère qu’il encombre et un beau-père violent. Souffre-douleur d’une bande de petits caïds de son école, il survit. Son seul refuge : l’amour inconditionnel de sa grand-mère.
De nos jours, dans une petite ville de la région parisienne, une petite fille s’épanouit entre ses deux mamans adoptives.
Un lien unit ces deux personnages que tout semble séparer. Leurs chemins se croiseront pour le meilleur et pour le pire.

Il rentra chez lui après les cours. Il n’avait pu résister à faire un détour chez mamie Dana pour faire des réserves de câlins avant d’affronter le bercail. Il était angoissé. Il embarqua Grisha pour avoir un allié dans l’antre familial. Il avait la main sur la porte d’entrée quand il entendit des éclats de voix et de verre brisé. Oh non, encore une dispute. Il avait déjà entrouvert la porte et ne pouvait rebrousser chemin. Son beau-père le fixait d’un œil mauvais. L’abat-jour du salon gisait sur le parquet en mille morceaux, au pied de sa mère. Cette dernière était échevelée, sa sempiternelle robe de chambre déchirée, un coquard la défigurant. Depuis qu’il était tout petit Vova voyait sa mère toujours revêtue de ce peignoir et pensait que c’était la tenue de toutes les mamans. En grandissant, le voile de l’innocence était tombé, arraché par les rumeurs qui étaient venues souiller son esprit d’enfant et il avait compris quel genre de « travail » exerçait sa mère. Il en avait été bouleversé, écœuré, honteux et en colère. Et il avait dû vivre avec cette réalité. Charmante scène familiale. Pas franchement accueillante. Terrifié, Grisha bondit des bras de Vova. Désorienté et perdu dans un lieu qui lui était inconnu, il tourna sur lui-même avant de foncer vers le salon. La mère de Vova éructa.
— Je t’ai déjà dit que je ne voulais pas de cet animal à la maison. Qu’est-ce qu’il fait ici ?

Grisha avait trouvé refuge sous un gros fauteuil en velours marron, élimé et imposant. Sa mère furieuse, essayait de l’en déloger sans succès. Dans un accès de rage elle poussa le fauteuil si violemment qu’il bascula au moment où Grisha s’enfuyait. Le craquement des os de sa petite carcasse retentit comme un coup de tonnerre dans la tête de Vova. Il resta pétrifié d’horreur, le regard fixé sur sa mère, accusateur, glacial, haineux. Aucun son ne put sortir de sa bouche. Son cœur était brisé. C’était comme si toute vie, toute chaleur humaine l’avait déserté. Ce qui restait de son âme d’enfant, le peu d’indulgence et d’espérance qu’il nourrissait à l’égard de sa mère, l’envie de pouvoir l’aimer un jour, s’évapora à tout jamais. La nature n’aime pas le vide. Son cœur soudainement asséché, se remplit de haine, de noirceur, nourries par la souffrance. Le cœur palpitant du petit garçon se figea en un bloc de glace.
C’est ce jour-là qu’il bascula du côté obscur. Il y a des âmes qui restent pures malgré les épreuves de la vie et d’autres qui ne s’en relèvent pas, et sont englouties par l’amertume, le ressentiment et se perdent dans les ténèbres.