Dans cette pièce de théâtre d’un genre singulier, l’auteur propose de retranscrire le parcours d’un jeune orphelin, surnommé « Le mat », depuis l’incendie de son pensionnat et son errance dans la rue jusqu’à sa mise en lumière médiatique par un cinéaste qui désire raconter son incroyable épopée.

Chaque scène se veut être une métaphore des vingt-deux lames du tarot de Marseille, qui sont, elles-mêmes, animées à travers un personnage et un message philosophique autour de l’existence.
L’intérêt de cet ouvrage est de déconstruire la vision selon laquelle le tarot est un objet qui se limite à la divination. Pour cette raison, il peut se faire l’écho d’une spiritualité sous-jacente chez un public frileux en matière d’ésotérisme mais aussi élargir la vision de ceux qui ont, déjà, connaissance de cet outil.
L’originalité de cet ouvrage réside, précisément, dans cette idée qu’un oracle divinatoire peut porter un message universel, en étant le corollaire de la psyché humaine, à travers les siècles.

Extrait – Scène 6- l’amoureux ou l’espoir éphémère

(Le mat, sous le choc après ce coup de théâtre, préfère fuir loin…Avec le peu d’économies qu’il lui reste, il se met à parcourir le pays, pendant plusieurs mois, et découvre un petit village aux couleurs du midi dans lequel il décide de faire une halte….; sur la place de la mairie, une danseuse, à l’allure d’Esméralda remue sauvagement …)
Le mat: « Excusez-moi, excusez-moi, vous savez qui est cette femme ?… »
Un spectateur: « Cette femme? ! Comme vous le voyez, c’est une danseuse, monsieur … »
(Le spectateur le regarde d’un air méprisant et s’éloigne ; après un temps qui lui paraît une éternité, le spectacle prend fin. Hypnotisé par la grâce de la jeune femme, le mat décide de prendre son courage à deux mains et décide d’aller lui parler… )
Le mat: « Pardonnez-moi, mademoiselle, je vous ai regardé danser, tout à l’heure, et j’avoue avoir été envoûté par votre danse: elle est si animale, si puissante. Je suis réellement impressionné… »
L’amoureuse: « Je vous remercie mais je danse depuis tellement longtemps, vous savez. »
(Après un moment de réflexion, elle se lance…)
« Je m’appelle Enamorada, l’amoureuse en espagnol… »
Le mat: « Enamorada ! C’est, vraiment, un très joli prénom et je dois vous avouer que je trouve qu’il vous va très bien. Quand vous dansez, je ne vois qu’une chose : votre amour pour la vie… »
L’amoureuse: « Merci, pour ce joli compliment. A mon tour de vous confier quelque chose: vous m’avez parfaitement cernée et j’avoue que cela ne m’arrive pas tous les jours. Comment vous appelez-vous ? »
(Alors que l’amoureuse sourit, le mat peine à dissimuler son trouble.)
Le mat: « Je m’appelle le mat…; j’aurai aimé vous donner quelque chose pour vous remercier de ce moment magique que vous m’avez fait vivre mais, hélas, je suis à la rue depuis plusieurs mois et je vis sur des réserves très fragiles… »
(L’amoureuse semble intriguée…)
L’amoureuse: « Je dois vous confesser être surprise. Vous n’avez, absolument, pas l’allure d’un jeune homme à la rue. Vous êtes très élégant et votre élocution est celle d’une personne instruite… »
Le mat: « C’est vrai. J’avoue être, plutôt, un bohémien, un voyageur en quête de sa vérité intérieure et pas vraiment un jeune homme qui subit le triste sort de sa misère
Je ne dirai pas que c’est un choix absolu. Certes, les circonstances de la vie m’ont vivement incité à prendre cette voie mais j’aurais pu, aussi, emprunter un chemin différent… »
L’amoureuse: « Je crois que je vois parfaitement à quoi vous faites allusion; j’ai, également, beaucoup voyagé et, plusieurs fois, j’ai eu des opportunités de me fixer, de me laisser aller à une ambition dévorante de réussite artistique et sociale mais quelque chose de beaucoup plus fort m’en a empêché : la liberté, ça n’a pas de prix…»