Entretien avec Carmen Mihai – Bounicou
Quel a été votre sentiment quand votre livre est paru ?
Lorsque ce livre est paru, j’ai réalisé à quel point il était important pour moi de l’amener à bon port. C’est comme si j’avais enfin déposé à jamais un lègue, afin que le lecteur puisse s’en emparer à son tour, emprunter ces chemins-là, lointains, mais stimulants pour sa pensée.
Quels ont été les retours des premiers lecteurs ? Que vous ont-ils dit sur votre livre ?
Les premiers lecteurs ont été enthousiastes, se déclarant conquis par l’atmosphère du livre ; ils m’ont avoué s’être sentis happer par le fil du récit, comme s’ils y étaient, sur les collines d’Adam, à épier, déguster les bons mots et humer la bonne cuisine de Bounica… On m’a fait part de la joie avec laquelle ils ont, pour certains, retrouvé leur enfance, la figure patriarcale de leur grand-père (bounicou, en roumain) … Je retiens aussi les remarques concernant la place de Bounica, qui, pour certains lecteurs, est bien plus importante que celle de son homme.
Que retenez-vous de cette expérience d’édition par rapport à votre travail d’écriture ? En avez-vous tiré des enseignements ?
Chaque expérience d’édition permet d’avancer vers ses lecteurs. J’avais commencé à travailler à ce livre bien avant la publication d’autres et je savais que ce récit avait besoin d’un temps long pour murir. Je l’ai toujours eu à l’esprit, comme étant donc celui de la véritable rencontre avec un lecteur exigeant et prêt à se laisser plonger dans ce monde qui le ramène à soi. Le devoir de mémoire joint ici celui d’avancer. Pour autant, je sais désormais qu’écrire et éditer, cela doit être penser simultanément. La couverture du livre m’apparaît comme un élément essentiel, de même que les détails concernant le contrat d’édition.
Quelle est l’originalité de votre livre selon vous ? A-t-elle été perçue par vos premiers lecteurs ?
Il n’est pas aisé de proposer le thème de l’avènement du communisme aux lecteurs francophones d’aujourd’hui. Le lecteur fait l’expérience d’un monde bousculé, mais résistant. L’originalité de ce premier roman, à mon sens, réside essentiellement dans le tissage des fils narratifs, des mots et des scènes de la vie d’un village à une époque de bouleversement des repères, et cela renvoie, in fine, à l’écoulement de la vie des uns avec les autres.
Comment s’est passé votre travail d’écriture ? Avez-vous une méthode pour écrire ? Des rituels ou des astuces ?
Écrire est une nécessaire activité de mon esprit. C’est la décantation du réel et la transfiguration des faits marquants pour cheminer et faire découvrir sous un autre jour le vivant. Le premier jet se voit retravailler maintes et maintes fois, pour que je puisse ensuite donner un tissage cohérent et éloquent de mes idées. Jusqu’au texte définitif, le chemin est long et plein de surprises : ce sont les joies de l’écriture. Il faut que mes textes reposent un moment avant de ressortir sur le devant de la scène. Il m’est difficile de dire ce qui déclenche l’envie de finalisation et d’édition d’un projet d’écriture. C’est sans doute un sentiment d’accomplissement, comme un fruit arrivé à maturité, bon à cueillir.
Envisagez-vous d’écrire un autre livre ? Si oui, sur quoi avez-vous envie d’écrire pour ce prochain livre ?
J’ai plusieurs projets qui me tiennent à cœur et qui sont, pour certains bien avancés. Pour autant, il m’est difficile de dire lequel sera achevé en premier. Mes sujets de prédilections s’appuient sur mon expérience de vie. Mes prochains livres puiseront dans cette source inépuisable d’inspiration romanesque qui est ma famille et mon pays d’origine. Il me reste encore beaucoup à dire sur les voyages de Bounica, sur les adoptions en Roumanie, sans oublier le témoignage concernant l’enseignement, tel qu’on le vit dans la classe, en France…
Carmen Mihai, auteure de Bounicou, disponible sur le site des Éditions Maïa. Cliquez ici pour le découvrir.