Sur fond d’une intrigue policière, puisqu’il est question de reliques dérobées, d’enlèvement, de séquestration et de meurtre, c’est le Mont Athos qui occupe la première place. République monastique orthodoxe située au nord de la Grèce dont les femmes sont bannies, il est un lieu coupé du monde et hors du temps. Tout se passe comme si son aura animait les personnages en présence. Léo, Sergueï et les autres, sans le savoir, vivent l’expérience spirituelle de la découverte d’eux-mêmes, comme si la montagne sacrée était elle-même une force spirituelle. Le dédale de ses sentiers, les vertiges inspirés par la somptuosité des paysages comme par les monastères surplombant la mer sont autant de métaphores de parcours initiatiques vécus par ces personnages si ordinaires au départ mais qui, au contact de ce lieu si particulier, découvrent leur essence sacrée.

Extrait

République Monastique du Mont Athos, Grèce, 3 Février 1810
Sa découverte avait déclenché un véritable séisme au sein de la communauté monastique. Après de nombreux débats parfois houleux, les représentants des vingt monastères de la Sainte République avaient décidé de tout détruire : pas seulement ce terrible secret mais aussi cette académie qui avait contribué à éloigner les moines athonites de leur foi et de leur spiritualité. Toutefois, dans un excès d’orgueil qu’il n’était pas parvenu à réfréner, le frère Ignatios ne put se résoudre à effacer le résultat de ses longues recherches, même s’il n’en ignorait pas la terrible portée. Il récita une dernière prière et se signa. Dehors résonnait l’écho des voix des autres moines qui allaient et venaient. Lorsqu’il sortit du bâtiment, il constata que les premiers brasiers avaient été allumés et que déjà des flammes s’élevaient vers le ciel froid et pluvieux de cette fin de journée hivernale.

Paris, France, 16 Août 2018
L’écran de son réveil indiquait 13h09. Léo avait un mal de crâne épouvantable, sa bouche et son gosier étaient secs comme un désert et il lui fallut plusieurs secondes pour commencer à rassembler les bouts de puzzle reconstituant sa virée nocturne. Il tenta de se lever pour aller chercher une bouteille d’eau mais son équilibre était plus que précaire. Son mini frigo qui était à moins de deux mètres de son lit compte tenu de l’exiguïté de son studio parisien du dix-septième arrondissement lui semblait pourtant terriblement inaccessible. Une fois debout, il s’accouda à sa fenêtre. Une agitation inhabituelle pour un dimanche régnait en bas de chez lui. L’antiquaire au coin de la rue organisait une vente d’objet vintage sur le trottoir, et toute la bourgeoisie-bohême des environs semblait s’y être donné rendez-vous à l’heure du brunch pour s’arracher à des prix indécents des seaux à glace en plastique « pomme », des tables en formica bleu ciel ou des balances de cuisine Terraillon qui avaient fait la renommée du designer italien Marco Zanuso au début des années soixante dix. Il eut soudain un haut le cœur, probablement autant dû à la futilité de ce brouhaha dominical en bas de chez lui qu’à l’abus de caïpirinha de la veille, et se dirigea vers sa salle de bains en quête d’un remède pour faire taire le tam-tam qui résonnait entre ses tempes.