Au fil des huit nouvelles d’un ouvrage qui donne envie à chacune de ses pages, Marc Noël fait vivre à ses lecteurs des rencontres impromptues, quelquefois improbables au cœur de l’authenticité de l’île de Madagascar.

Lorsque Frank, le personnage principal du livre, au hasard d’une rencontre avec le clergé local se retrouve , sans crier gare, affublé d’une soutane, beaucoup trop courte, devant les fidèles d’une église de brousse, il y a de quoi se poser des questions – même si Frank avait eu le réflexe de retirer le Bouddha qui pendait à son cou ! On n’est pas loin du « burlesque », les lecteurs apprécieront et pourtant…
Avec l’auteur, on parcourt un monde inhabituel, profondément singulier qui pose parfois question au monde occidental. Par-delà les constats regrettables d’une pauvreté récurrente, l’Île Rouge reste mystérieuse, une sorte d’enfer au paradis. Dans un style épuré et un rythme soutenu, quand le curseur, teinté d’une bonne dose d’humour, est poussé jusqu’à l’émotion, l’auteur nous fait partager un véritable anticliché sociétal, loin des stéréotypes.

Extrait

Le prêtre par intérim, s’était rapidement rendu à l’extérieur de l’édifice, toutes les brebis avaient pu trouver place, la cérémonie pouvait commencer. Frank allait pouvoir souffler, même s’il avait encore du mal à réaliser qu’il avait été, certes, en tout bien tout honneur, un porte-parole occasionnel de Dieu mais, ne dit-on pas que « l’occasion fait le larron » ? L’office avait débuté devant une foule de fidèles profondément silencieux, très à l’écoute du message de bienvenue de leur évêque. Le vicaire général était alors intervenu pour précisément informer les confirmands accompagnés de leurs filleuls qu’ils allaient devoir s’approcher en bon ordre de l’autel pour recevoir l’onction épiscopale. Vu leur nombre, l’administration du saint chrême risquait fort de durer longtemps même si le patron du diocèse avait demandé l’aide de trois prêtres et du curé local, Frank l’avait échappé belle… Pas pour longtemps, pas pour tout !

– Nous avons parmi nous le « Père » Frank qui a bien voulu nous aider pour que cette cérémonie soit une réussite, levez vous mes frères, avait lancé le second personnage du diocèse. Frank n’avait pas pu esquiver le moindre geste. Debout devant les fidèles, pas vraiment à l’aise dans une soutane qui dépassait tout juste ses deux genoux, il avait,  très religieusement, salué l’assemblée qui ne tarissait pas d’applaudissements. Frank passait ce soir en vedette américaine, un show totalement improvisé, juste avant la bénédiction finale.