Ces dernières années, la société et les médias abordent et échangent plus facilement autour de la psychiatrie et, plus largement, de la santé mentale. La pandémie de Covid-19 et les confinements successifs ont également exacerbé les troubles psychiques, pour lesquels le grand public éprouve généralement de la peur ou du rejet. Les efforts de déstigmatisation menés par les établissements de santé spécialisés, les ARS et le Gouvernement n’y sont certainement pas étrangers ; ainsi, la société ose maintenant parler un peu plus de santé mentale sans forcément évoquer un meurtre perpétré par une personne atteinte de troubles psychotiques. De plus, une formation venue d’Australie, la formation aux premiers secours en santé mentale, démontre un fort engouement et un nombre croissant de participants.

L’ambition de cet ouvrage est d’apporter un support nouveau au grand public pour l’aider à faire face, dans son quotidien, à une personne présentant un trouble de santé mentale. Dans un langage accessible, agrémenté de photos et de vidéos, ce livre se veut clair, synthétique et en réponse aux questions du terrain ;il permet de guider le citoyen dans son approche des premiers secours psychiques.

Ce guide n’a pas la prétention d’être exhaustif mais se veut être une ressource et un support pour le grand public, mais aussi pour les primo-intervenants comme les sapeurs-pompiers, les ambulanciers, la police, la gendarmerie et le SAMU. « Premiers secours et souffrances psychiques » fournit les bases d’une réflexion actualisée, voire d’un complément de formation pour les professionnels de l’urgence.

Extrait de  Premiers secours et souffrance psychique  de Céline Cappello, Johanna Gey et Aymeric Lapp

6. Conduite à tenir

A – La crise psychotique aiguë
Dans un état de crise psychotique aigu, la personne peut perdre pied avec la réalité, être envahie par des hallucinations et/ou des délires, et être désorganisée. Les symptômes sont d’une telle intensité qu’elle n’arrive plus à fonctionner de manière adaptée dans sa vie quotidienne.
Quelle est l’attitude à adopter face à une personne en crise psychotique ?
– L’APPROCHER ET LUI FAIRE PART DE NOS PRÉOCCUPATIONS.
Faites part à la personne des éléments factuels que vous pouvez observer et de votre ressenti, parlez en votre nom : « Je suis inquiet(e) car… ».
– VEILLER À SA SÉCURITÉ ET À LA NOTRE.
S’assurer que la personne ne se sente pas enfermée, piégée, qu’elle ait un moyen de sortir de la pièce si elle en ressent le besoin.
Veiller à ce que le secouriste puisse lui-même s’extraire rapidement de la pièce si la personne devient agressive. On ne va donc pas aller s’enfermer dans un coin d’une pièce sans possibilité d’en sortir.
– NE PAS TOUCHER LA PERSONNE.
Dans la mesure du possible, faites en sorte d’arriver face à la personne, afin de ne pas la surprendre.
Le/la secouriste doit également veiller à garder une distance respectueuse et sécurisée, en se tenant à une distance d’un bras minimum entre la personne et lui/elle.
– S’INTÉRESSER À CE QUE LA PERSONNE EST EN TRAIN DE VIVRE.
Le/la secouriste va reformuler pour s’assurer d’avoir bien compris ce que la personne est en train de vivre.
Il/elle doit faire preuve d’empathie.
Gardez un contact visuel pour lui montrer que vous êtes disponible et à l’écoute, mais il ne faut pas que ce contact soit trop insistant ou fixe, afin que la personne ne se sente pas persécutée et n’interprète pas votre regard comme une provocation.
– NE PAS NÉGOCIER AVEC LA PERSONNE, NI TENTER DE LA RAISONNER.
Les personnes en crise psychotique peuvent tenir un discours inadapté et avoir des hallucinations et/ou des délires. Même si ce que la personne vous dit n’a aucun sens pour vous, que vous ne voyez ou n’entendez pas ce qu’elle est en train de vous décrire, restez à l’écoute sans vous opposer à elle, sans nier que ce qu’elle est en train de vivre est réel pour elle. Vous pouvez utiliser des formules comme : « Je suis conscient(e) et je comprends que pour vous, tout cela semble réel, mais je ne peux pas voir (ou entendre) ce que vous êtes en train de me décrire. »
Évitez de répondre par des phrases comme : « C’est n’importe quoi. », « Ça n’existe pas. », « Vous délirez… »
– EXPRIMER LE FAIT QUE L’ON A BESOIN D’AIDE (VOUS ET LA PERSONNE).
– DEMANDER À LA PERSONNE SI ELLE A DES DIRECTIVES ANTICIPÉES OU SI ELLE SAIT QUI APPELER EN CAS DE CRISE.
De plus en plus de personnes rédigent des directives anticipées, permettant de savoir quoi faire et qui appeler lorsque la personne vit une crise aiguë.
– SI LA PERSONNE N’EST PAS EN MESURE DE PRENDRE DES DÉCISIONS, L’INFORMER DES SOLUTIONS D’INTERVENTION POSSIBLES ET QUEL EST LE TYPE D’INTERVENTION CHOISI.
Si elle est consentante aux soins, nous pourrons la diriger vers les urgences psychiatriques, son psychiatre ou l’hôpital psychiatrique de référence. Dans la mesure du possible, accompagnez-la dans ses démarches.

Précédentes publications

• Aymeric LAPP, « Gestes d’urgence : 53 fiches pour savoir réagir dans toutes les situations d’urgence du quotidien », mai 2023.

• Aymeric LAPP, « Urgences pour l’infirmière : 54 fiches pour prendre en charge les urgences hors établissement de santé », avril 2022.
• Aymeric LAPP (co-auteur), « Guide AS – Aide-soignant », 5ème édition, août 2021.
• Aymeric LAPP, « Le SAMU, l’urgence médicale au quotidien », avril 2017.
• Aymeric LAPP, « Le SAMU Lorraine », décembre 2013.