Entretien avec Julien Guillevic – Apprenti détective

Entretien avec Julien Guillevic – Apprenti détective

Quel a été votre sentiment quand votre livre est paru ?

J’ai tout d’abord éprouvé un fort sentiment de crainte à la parution de mon livre, car je n’avais jamais imaginé que cette très vieille histoire née dans ma tête alors que je n’étais qu’un adolescent, et issue de toutes les peurs que je pouvais ressentir à cette époque verrait le jour. Je n’ai jamais imaginé que ce qu’il se passait dans ma tête serait lu, par qui que ce soit. Cela a toujours été un secret, connu de personne, ni de mes parents ni de ma sœur ni de mes amis, ni même de ma femme. Passé cette appréhension, je dois avouer avoir ressenti de la fierté, non pas pour moi-même, mais pour le petit garçon qui à l’époque avait la trouille dans le noir. Il n’aura pas ressenti tout cela en vain. Je suis particulièrement content aujourd’hui de voir que ce livre plaît. Je voulais aussi souligner la qualité parfaite du livre, dans ses matériaux et sa résistance. J’avais une grande appréhension sur cela et j’en suis totalement satisfait.

Quels ont été les retours des premiers lecteurs ? Que vous ont-ils dit sur votre livre ?

Les premiers retours étaient très attendus, et n’étant pas écrivain de métier j’étais et je reste dans l’attente totalement ouvert à tout commentaire. Je les demande et m’en nourris tous les jours pour avancer et m’améliorer.

Les premiers commentaires étaient très satisfaisants dans la mesure ou certains lecteurs m’ont avoué ne pas avoir pu fermer le livre à la fin du chapitre comme ils le prévoyaient. Certains ont même lu le livre en 3 jours tellement ils étaient happés par l’histoire. L’atmosphère est bien décrite, on ressent la peur et l’ambiance particulièrement pesante. Les personnages sont bien dépeints, on les visualise parfaitement. Une animatrice radio pensait même que j’exerçais un métier en lien avec la police, les enquêtes ou le milieu judiciaire tellement elle trouvait l’enquête particulièrement bien menée, ficelée et réaliste. C’est là toute la difficulté quand on relate une fiction, il faut que les faits paraissent les plus réalisables et plausibles possibles. Tenir le lecteur jusqu’au bout de l’histoire a été le plus gros challenge que je m’étais donné de relever, et à priori c’est réussi. Tromper le lecteur a aussi été un jeu qui a porté ses fruits. Les gens, les locaux surtout, se sont retrouvés dans les expressions normandes, le climat, les noms et l’ambiance lourde de la campagne en hivers. Ma femme qui elle lit énormément de polar (Harlan Coben) est tombé par hasard sur mes cahiers, en faisant le ménage. Elle a été la première conquise. Elle trouvait mon histoire vraiment captivante… C’est elle qui m’a poussé à la faire valider par un comité de lecture, et à lancé l’aventure.

Que retenez-vous de cette expérience d’édition par rapport à votre travail
d’écriture ?
En avez-vous tiré des enseignements ?

J’ai été particulièrement heureux d’avoir été libre d’apposer ma propre photo pour les couvertures du livre. Je voulais que l’ouvrage reste le plus personnel possible. La qualité du livre est parfaite, exactement ce que j’espérais. Beaucoup d’ouvrages n’ont pas cette qualité. Les mises en page sont propres, je ne regrette absolument pas mon choix. J’attends de voir la force de vente qu’offre ma maison d’édition. 

Quelle est l’originalité de votre livre selon vous ? A-t-elle été perçue par vos premiers lecteurs ?

Je dirais que l’originalité de mon livre réside dans le fait qu’il soit né d’une réelle expérience. Les émotions décrites ont été ressenties par l’auteur, dans sa chair et son esprit. Il lui a fallu des années pour le retranscrire sur papier, mais on sent la force et la puissance des tourments. Le fait de devoir aller chercher son car de très bonne heure le matin, dans la nuit et les températures glaciales de l’hiver, dans la campagne vide et endormie faisait partie du quotidien de tous les enfants de l’époque. Tous les lecteurs de mon âge rencontrés ont vécu la même chose. Ils en ont tous un souvenir impérissable. Quelque-soit l’enfant, ça le marque à vie. Aujourd’hui il paraît totalement inconcevable de laisser un enfant marcher seul dans la nuit. C’est l’évolution entre les générations que j’ai largement partagé avec les personnes avec qui j’ai pu discuter sur les marchés et salons.

Comment s’est passé votre travail d’écriture ? Avez-vous une méthode pour écrire ? Des rituels ou des astuces ?

Mon travail d’écriture est assez particulier.

Au départ il s’agissait simplement de sortir et d’évacuer toutes mes angoisses de moi-même ; dans le but d’être assez fort pour pouvoir y retourner le lendemain. Marcher seul la nuit dans le noir me faisait vraiment peur. Sachant que comme tous les ados de 17 ans on veut paraître fort et sûr de soi, j’étais bien trop fier pour en parler à mes amis ou mes parents, j’ai donc préféré écrire tout cela sur un simple cahier que je gardais soigneusement caché sous mon lit. Personne n’en a jamais rien su. 

Années après années je suis retombé à plusieurs reprises sur ces notes. J’ai trouvé plaisant et amusant de le lire, le relire et lui apporter une suite, un développement, de nouer encore plus l’intrigue, de faire entrer des personnages et ce jusqu’à ce que 27 ans plus tard j’y apporte une fin. Ce dernier hiver particulièrement long, gris et sombre était un terrain très fertile pour mon livre. J’écris toujours la nuit, lorsque tous les sens sont coupés. Sans la vue, sans l’ouïe, ni l’odorat, ou le toucher, le cerveau est décuplé. Les idées et les phrases viennent facilement. Tout se matérialise, tout paraît possible… réalisable.

A présent encore, des centaines d’idées, d’interactions, de personnages, de rebondissements me viennent sans arrêts.

!

Envisagez-vous d’écrire un autre livre ? Si oui sur quoi avez-vous envie
d’écrire pour ce prochain livre ?

Ce n’est pas parce que j’ai mis un point final à mon premier ouvrage que le cerveau s’arrête d’imaginer et de nouer d’autres scénarios. Certaines nuits il m’est encore impossible de dormir, et mon cerveau ne me laisse pas en paix tant que je n’ai pas noté sur papier mes idées.

Oui, un autre ouvrage est dans les tuyaux, mais j’attends encore beaucoup de retours de lecteurs sur le premier livre. 

Mon univers plutôt anxiogène, sombres et angoissant me plaît beaucoup. Je pense réussir à faire passer les sensations moi-même ressenties aux lecteurs. Je vais donc continuer dans cette voie, tant que les idées fusent.

Julien Guillevic , auteur de Apprenti détective, disponible sur le site des Éditions Maïa. Cliquez ici pour le découvrir.