Ce roman s’adresse à un large public, car la vie sentimentale et la naissance de l’amour touchent chacun d’entre nous. Il saura particulièrement captiver ceux qui ont vécu les années 70 ou qui sont passionnés par le passé récent, tout en conservant une dimension intemporelle.

Après avoir publié des ouvrages de sciences sociales et deux romans, je me consacre désormais principalement à la fiction. La passion pour l’écriture et la fiction est ce que je souhaite partager avec tous ceux qui auront le désir de me lire.

Extrait de  Gisèle  par Michel Perrier

Le vendredi venu, je crois avoir fait le tour des élèves. Je peux mettre des noms sur quasiment tous les visages. J’avais remarqué deux filles, des BEP secrétariat, toujours ensemble en train de rire : l’une blonde bouclée et l’autre brune aux longs cheveux raides, les visages ingrats de l’adolescence contrariée. Je les avais surnommées Zig et Puce, mais on m’apprit qu’elles se nommaient Béa et Odile. On m’apprit aussi qu’elles se connaissaient depuis la maternelle, que leurs familles étaient très liées, partaient en vacances ensemble, et qu’on les avait virées en même temps du collège. « Il y a du boulot, » m’avait glissé à l’oreille Francette, « peuchère, si tu veux mon avis, elles ne sont pas sorties de l’auberge. »

J’avais également constaté qu’une jeune fille campait durant le temps de pause devant le portail d’entrée, l’air d’attendre quelqu’un, à moins que ce ne fût la sortie. Elle était assez fine, brune aux cheveux courts, vêtue de façon classique, discrète et ne se mêlant pas aux autres. Je la trouvais plutôt jolie, mais son visage exprimait une certaine gravité, une maturité que ne possédaient pas les autres filles. Je me l’imaginais alors comme soutien de famille, assumant la charge de ses frères et sœurs, ou torturée par un drame amoureux, ou même mariée… Elle renvoyait un je-ne-sais-quoi d’inaccessible, la sensation d’évoluer dans un ailleurs qui piquait ma curiosité. Mes condisciples ne semblaient pas la considérer, préférant sans doute les filles plus extraverties ou plus abordables.

Le vendredi, à la pause de l’après-midi – la récré, comme l’appellent les élèves –, je vérifiai sa présence devant le portail. C’est à ce moment que la directrice vint à sa rencontre : « Gisèle, tu peux venir s’il te plaît ? » J’appris ainsi que la nouvelle venue dans mon univers se prénommait Gisèle. C’est le prénom qui me manquait. Gisèle.